Photo © David Boureau
Structure Une anti-muraille pour la tour Eiffel
Le Moniteur daté du 24 mai 2019 consacre un dossier aux mesures de protection de l'espace publics face à la menace terroriste : "L'Espace Public sous haute protection" qui présente la sécurisation du site de la tour Eiffel réalisée par l'architecte Dietmar Feichtinger, le bureau d'études OGI et les paysagistes de Vogt. Après un peu plus d'un an de chantier, les 834 m de clôture qui sécurisent le monument et ses abords ont été achevés en décembre dernier.
Deux parois de verre hautes de 3 mètres ferment le site parallèlement à la Seine Photo © David Boureau
Un monument parmi les plus célèbres au monde peut-il à la fois séduire les foules et vouloir les contrôler ?
Chargé de boucler une ceinture de sécurité autour de la tour Eiffel, à Paris, l'architecte Dietmar Feichtinger avait à résoudre cette évidente contradiction. « Le propos du projet était de dire "je me protège" et non pas "je me défends"», estime-t-il. Pas question dès lors, ni pour lui, ni pour la maîtrise d'ouvrage, de dresser des murs ostensibles et agressifs. Si l'enceinte livrée en décembre 2018 représente une solution radicale pour empêcher les intrusions entre les piliers de la tour et protéger le public en cas d'attaques par armes à feu ou véhicules-béliers, « l'enjeu esthétique et le respect du site étaient aussi très forts, rappelle Jean-François Martins, adjoint à la maire de Paris, chargé entre autres du tourisme. L'appel d'offres imposait notamment que la transparence soit maintenue dans le grand axe, entre la Seine et l'Ecole militaire ».
Les agents de sécurité procèdent au contrôle des visiteurs dans deux séries de pavillons, situés de chaque côté du site. Photo © David Boureau
Mis en chantier en septembre 2017, le dispositif d'un périmètre total de 834 m se présente, au nord-ouest et au sud-est, sous la forme de deux longues parois en panneaux de verre six couches, hauts de trois mètres. Pour les parties latérales, le programme prévoyait une grille qui, si elle empêchait le passage des hommes, ne devait pas arrêter la circulation de la petite faune. L'architecte a dessiné des montants en acier autopatinable dont la silhouette en pointe évoque l'élancement de la tour. Couleur rouille, la grille cherche à se fondre dans la
végétation. « Cette clôture fait davantage partie de la nature que de l'architecture», estime Dietmar Feichtinger pour qui cet aménagement relevait aussi d'un projet de paysage. En effet, si le public ne peut plus aborder la tour de manière frontale, il arrive jusqu'au monument en passant par ses jardins historiques. Les quelque sept millions de visiteurs annuels mais aussi tous les promeneurs qui le souhaitent, puisque l'accès au site reste gratuit, peuvent ainsi redécouvrir ce petit parc d'un romantisme très XIXe siècle, avec fausse grotte et belvédère. Un travail de recomposition paysagère mené avec l'agence Vogt a permis d'y clarifier les parcours. Pour Jean-François Martins, la contrainte de sécurité a aussi l'avantage d'avoir mis à l'écart la circulation automobile du quai Branly: «Le visiteur n'est plus coincé contre une "autoroute". C'est plus agréable.» Et assurément plus silencieux.
Le verre extraclair du dispositif assure une transparence dans l'axe du Champ-de-Mars. Photo © David Boureau
L'enceinte n'en demeure pas moins un équipement officiellement réversible. Elle a en effet été conçue pour être facilement démontable dans la perspective de périodes futures plus heureuses. Cet espoir est toutefois teinté de prudence. Dans la compétition lancée pour le réaménagement à venir du « Grand site tour Eiffel», soit 54 ha situés entre le Trocadéro et l'Ecole militaire, et dont le lauréat devait être connu en cette fin mai, il a été demandé aux candidats de prendre en compte le dispositif.
La grille a été spécifiquement dessinée, avec ses pointes élancées de 3,24 m. Un clin d'oeil aux 324 m de la tour. Photo © David Boureau
L'accès au monument s'effectue désormais par les jardins, ce qui permet de les redécouvrir. Photo © David Boureau
Maîtrise d'ouvrage: Ville de Paris et Société d'exploitation de la tour Eiffel (Sete). Maîtrise d'oeuvre: Dietmar Feichtinger Architectes, architecte mandataire; BET: SBP (structure), OGI (VRD), Inex (fluides), Vogt (paysage), ON (conception lumières), Suretis (sûreté), CSD Faces (sécurité incendie). Principales entreprises: Eurovia IDF (mandataire VRD), Segex (mandataire génie civil), Satelec (mandataire électricité). Coût total: 35 M€ TTC.
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